Règles générales

« Et tu les écrira sur les frontons de ta maison et sur tes portes. »
וּכְתַבְתָּ֛ם עַל־מְזוּזֹ֥ת בֵּיתֶ֖ךָ וּבִשְׁעָרֶֽיךָ׃


Torah - Dévarim ( 6:9)



Ecrire et non pas sculpter

On pourrait croire que les technologies évoluant, il aurait été possible d’imprimer nos textes transformant le travail de scribe en celui d’imprimeur. Ce qui aurait comme conséquences la baisse importante des coûts de reproduction mais plus important encore l’impossibilité de commettre une erreur de copiste. Mais ce n’est pas le cas. Aujourd’hui encore, rouleaux de Torah, téfilines, mézouzot ou méguilot doivent être le résultat d’une écriture manuscrite sans que la moindre lettre soit imprimée, sculptée ou gravée sous peine de nullité. Cette exigence immuable qui veut que chaque lettre soit écrite, et non obtenue par gravure est enseigné dans la Torah par le biais un seul mots: וכתבתם.

En sofrout, il est interdit de "sculpter" les lettres, c'est-à-dire de les former en grattant ou en modifiant leur forme après leur inscription sur le parchemin. Cette règle est liée au principe que chaque lettre doit être écrite dans sa forme complète dès le départ, sans nécessiter de correction par soustraction de matière.

Fondements de cette interdiction

  • Écriture complète et intacte : Selon la halakha, chaque lettre doit être écrite directement et entièrement en respectant sa forme. Si une lettre est incomplète ou mal formée, elle ne peut pas être "réparée" en la sculptant, c'est-à-dire en la corrigeant par grattage ou par découpe.
  • Exigence de k'tiva tamah (écriture parfaite) : L’écriture des tefillin, des mezouzot et des Sifrei Torah doit être réalisée de manière à ce que chaque lettre soit immédiatement reconnaissable et conforme aux standards de la tradition.
  • Distinction entre l'écriture et la sculpture : Le Rambam (Maïmonide) et d'autres décisionnaires expliquent que la Torah exige que les lettres soient formées par un acte d’écriture (k'tiva), et non par un acte de gravure ou de correction a posteriori.

Conséquences

  • Un scribe (sofer) doit s’assurer que chaque lettre est correcte dès qu’elle est tracée.
  • Si une lettre est mal formée ou se touche avec une autre, il est parfois possible de corriger l’erreur en grattant l’encre, mais uniquement si la lettre reste conforme aux règles halakhiques.
  • Une lettre créée par grattage n’est pas valide et rend potentiellement tout le texte invalide.

Règles pratiques

  • Le mot וכתבתם nous apprend l'exigence particulière que chaque lettre soit écrite et non obtenue par gravure. Kesset aSofer Chapitre 8 - Loi 1 & ChoulHane Arourh - Ora’H Hayim: Chapitre 32 - § 17.
  • Partout où l’on dit: “On écrit…” , comme pour des téfilines, des mézouzot, un Séfer Torah ou un acte de divorce, cet écrit sera invalide si l’on a sculpté la moindre lettre au lieu de l’écrire, même si cela ne concerne que la pointe d’un youd. Michna Béroura Sm. 32 - Michnat Soferim.
  • Si l'on gratte le corps d'une lettre ou ses extrémités, et ce faisant, on a fait apparaitre une lettre, celle-ci est invalide car gravée. Par conséquent, écrire un dalet au lieu d'un rech, un bet au lieu d’un caf, et gratter la saillie revient à graver une nouvelle lettre. Kesset aSofer Chapitre 8 - Loi 1.
  • Gratter n'est pas écrire, et s’apparente à sculpter. Mais ajouter de l’épaisseur à un dalet pour le transformer en rech ou prolonger le toit d’un rech pour en faire dalet est autorisé. Michna Béroura: Chapitre 32 - Ot 68.
  • Si une goutte d’encre tombe à l'intérieur d'une lettre, la rendant informe, il ne sera pas possible de corriger en grattant l'encre pour la redéfinir: ce serait la sculpter. ChoulHane Arourh - Ora’H Hayim: Chapitre 32 - § 17.
  • Si en cours d’écriture une lettre était gâchée par maladresse ou par une tache d’encre la rendant partiellement défectueuse, que cette défectuosité porte sur une petite pointe - sans laquelle la lettre serait invalide – et qu’on a gratté la partie défectueuse pour ensuite terminer la lettre, celle-ci serait toujours invalide. Kesset aSofer Chapitre 8 - Loi 2.
  • Sur une lettre tachée mais dont la forme a été préservée, on pourra gratter l’encre quelque soit l’endroit où la goute d’encre est tombée, qu’il s’agisse du vide intérieur ou du tracé - si cela en a par exemple épaissi le toit ou le jambage - on pourra corriger sans risque de sculpter. Michna Béroura: Chapitre 32 - Ot 67.
  • Selon certains avis - Le Bet Yossef et le Rema (Even-aEzer 125:4) estiment que “sculpter” implique que la lettre soit terminée par grattage - , gratter en partie une goutte d’encre superflue pour ensuite terminer une lettre est autorisé. Pour d’autres - dont le Rada’k - cela est assimilable à sculpter. Michna Béroura: Chapitre 32 - Ot 67.
  • Si un mem se retrouvait fermé - le transformant en même final - il ne servirait à rien d’en rétablir l’ouverture : ce serait sculpter. Un mem étant formé d’un vav accolé à un noun, pour corriger il suffira de gratter le vav et ne laisser que le noun - Certains décisionnaires préconisent d’effacer toute la lettre chaque fois que cela est possible. Voir Kesset aSofer Chapitre 8 - Loi 8. - . Après quoi on ré-écrira ce qui a été ôté. ChoulHane Arourh: Chapitre 32 - § 18.
  • Si l’on a écrit un dalet au lieu d’un rech, il ne suffira pas de retirer le jambage ou le toit pour lui rendre une forme de rech, il faudra retirer les deux. ChoulHane Arourh - Ora’H Hayim: Chapitre 32 - § 18.
  • Si l’on a écrit un rech et ensuite, voyant qu’on s’est trompé, ajouté une excroissance pour en faire un dalet, il faudra effacer soit le toit soit le jambage ainsi que l’excroissance, puis finir d’écrire le rech. Kesset aSofer Chapitre 8 - Loi 6.
  • Une lettre collée à une autre invalide tout le parchemin. On pourra cependant gratter l’endroit de la jointure - et ce ne sera sculpter - dans la mesure où aucune des lettres n’avaient perdu avant cela sa forme normale. ChoulHane Arourh - Ora’H Hayim: Chapitre 32 - § 18.
  • Si le jambage d’un hé ou d’un kouf touchait le toit de la lettre, il faudrait le retirer et le ré-écrire correctement sans qu’il soit besoin d’ôter le reste de la lettre. ChoulHane Arourh - Ora’H Hayim: Chapitre 32 - § 18.
  • Si le pied du aleph ou le youd supérieur touchait la diagonale, l'écriture serait invalide. On ne pourra pas gratter pour les séparer: ce serait sculpter mais on retirera tout ce qui aura été tracé après ce point de contact superflu pour le ré-écrire. ChoulHane Arourh - Ora’H Hayim: Chapitre 32 - § 18.
  • Il ne servira à rien de la repasser à l’encre une lettre préalablement sculptée, cela ne constituant pas une ré-écriture. Kesset aSofer Chapitre 8 - Loi 13.
  • Si de la cire ou de la graisse tombe sur une lettre - même si la lettre s’en trouve obscurcie - retirer la cire ou la graisse n’est pas sculpter. Apres cette opération, la lettre redevient valide. Kesset aSofer Chapitre 8 - Loi 14.