Règles générales

« Et que les paroles du Seigneur soient sur votre cœur. »
וְהָי֞וּ הַדְּבָרִ֣ים הָאֵ֗לֶּה אֲשֶׁ֨ר אָנֹכִ֧י מְצַוְּךָ֛ הַיּ֖וֹם עַל־לְבָבֶֽךָ׃


Torah - Dévarim (6:6)



L'Écriture Chronologique dans la Sofrout

L'écriture chronologique, appelée en hébreu "kessidran" (כסידרן), est une règle essentielle dans la sofrout qui stipule que certaines écritures doivent être rédigées dans un ordre précis, que chaque lettre doit être écrite dans l'ordre exact du texte sans possibilité de revenir en arrière pour corriger une erreur. La règle du kessidran est l’une des exigences les plus strictes de la sofrout, particulièrement pour les tefillin et mezouzot, où toute correction postérieure est interdite.

La règle du kessidran est mentionnée dans le traité Menahot 32b. Dans un Sefer Torah, la correction est possible tant que les lettres restent conformes et que le nom divin n’est pas touché. Cela souligne l’extrême rigueur requise dans l’art du sofer stam et l’importance de l’écriture minutieuse dans le respect des textes.

Application du Kessidran selon les types de textes

L'exigence d'écriture dans l'ordre varie selon le type de texte que le sofer rédige :

  • Tefillin et Mezouzot – Obligation Stricte
    L'écriture des tefillin (parchemins des phylactères) et des mezouzot doit impérativement être réalisée dans l'ordre exact du texte.
    Si le sofer réalise une erreur dans une lettre ou un mot et ne la corrige pas immédiatement avant de poursuivre, il ne pourra plus revenir en arrière pour corriger l'erreur.
    Exemple : Si le sofer oublie une lettre dans le mot "ישראל" dans la phrase "שמע ישראל" et s'en aperçoit après avoir écrit d'autres mots, le parchemin est pasoul (invalide), car il est impossible d'ajouter la lettre manquante sans violer la règle du kessidran. Correction possible ?
    Si l’erreur est détectée immédiatement, avant de continuer l’écriture, elle peut être corrigée. Sinon, le parchemin doit être refait entièrement.
  • Sefer Torah – Pas d’Obligation Stricte
    Contrairement aux tefillin et aux mezouzot, un Sefer Torah peut être corrigé même après avoir écrit des lettres ou des mots suivants. Le bodek (vérificateur) peut repérer des erreurs après l’écriture et permettre au sofer de corriger ou ajouter des lettres si nécessaire.
    Exemple : Si une lettre est mal formée dans un Sefer Torah et qu’elle est corrigée plus tard, le rouleau reste kasher tant que la correction respecte la forme halakhique des lettres.
    Correction possible ?
    Oui, tant que la correction ne modifie pas un nom divin. Une lettre peut être grattée et réécrite sans problème, car le kessidran ne s’applique pas ici.

Règles pratiques

  • Les téfilines et les mézouzot doivent être écrits en ordre chronologique, conformément à la Torah, dans laquelle il est dit : « Et ces choses-là seront écrites...» Ce qui sous-entend « dans leur ordre ». Anticiper l’écriture d’une section, d’un mots ou d’une lettre, invalide l’ensemble du texte. ChoulHane Arourh - Ora’H Hayim: Chapitre 32 - § 23.
  • L’écriture chronologique s’applique à toutes les lettres hormis celle qui vient d’être écrite ou pour des détails non-invalidant et dont la correction est facultative. Michna Béroura: Sm. 36 - Michnat Soferim.
  • L’écriture chronologique ne s’applique pas aux lettres composées comme un tsadi créé à partir d’un youd et d’un noun: tracer d’abord le noun et ensuite le youd n’enfreint pas la règle. Michna Béroura: Sm. 36 - Michnat Soferim.
  • Si on commence à tracer une lettre et qu’on revienne tracer la lettre précédente, pour ensuite finir la première, on n’enfreint pas la règle car celle ne s’applique qu’à des lettres complètement tracées; le texte parlant de « choses » et n’est considérée comme telle qu’une « chose complètement terminée » et non à moitié. Michna Béroura: Sm. 36 - Michnat Soferim.
  • Une lettre endommagée ou n'ayant manifestement plus sa forme (ex. un youd sans jambage droit, un chin sans l’un des youd, une lettre incomplète, etc.) même si ce défaut ne la rapproche d’aucune autre lettre ou qu’un enfant la nomme correctement, cette lettre et tout ce qui a été écrit postérieurement est invalide car la moindre correction briserait la chronologie d’écriture. Michna Béroura: Sm. 36 - Ot 114.
  • Dans le cas d’une lettre ressemblant à une autre (ex. un dalet à rech, un bet à un caf, un ‘Het avec une rupture entre le jambage gauche et le toit ressemblant à un hé, un tsadi au youd séparé au toit qui ressemble à un youd suivi d’un noun, etc…) il sera inutile de la montrer à un enfant et toute rectification irait pourra à l’encontre de la chronologie d’écriture. Michna Béroura: Sm. 36 - Ot 114.
  • Si malgré un défaut une lettre a conservé sa forme (ex. une fine rupture entre le youd d’un aleph, d'un chin, d’un jambage de tav et le corps) et qu’un enfant pas particulièrement intelligent ou inculte la lise correctement, la lettre, invalide car imparfaite, pourra être corrigée sans aller à l’encontre de la chronologie d’écriture. Michna Béroura: Sm. 36 - Ot 114.
  • Une lettre identifiable par un enfant mais qui nécessiterait un grattage et une ré-écriture (ex. un hé ou un kouf dont le jambage touche très légèrement le toit) sera impossible à corriger car cela irait à l’encontre de la chronologie d’écriture. Michna Béroura: Sm. 36 - Ot 114.